Le 15 novembre, une équipe internationale de scientifiques a publié une étude sur les chauves-souris parue dans Biology Letters. Ces animaux ne seraient pas autant responsables de la transmission de virus qu’on ne le dit.
Intitulée Robust evidence for bats as reservoir hosts is lacking in most African virus studies: a review and call to optimize sampling and conserve bats, l’étude, parue dans Biology Letters, menée par une équipe internationale de biologistes, virologues et défenseurs de l’environnement remet en question la perception courante selon laquelle la chauve-souris serait responsable de la transmission de plusieurs virus. Une idée reçue à nuancer dès son départ, il existe en effet plusieurs centaines d’espèces différentes
Considérées à tort comme étant vecteur de virus, les chauves-souris ne jouissent pas d’une bonne réputation. Sébastien Puechmaille, maître de conférences de l’Institut des sciences de l’environnement de Montpellier (Isem) et participant à l’étude, explique à France Culture, l’origine de ces allégations. « Ça remonte au début des années 2000, quand il y a eu la première émergence du premier coronavirus après l’an 2000. On a cherché si on pouvait trouver une espèce sauvage qui avait ce virus-là. Et on s’est rendu compte, en Chine notamment, qu’il y avait des chauves-souris qui portaient des cousins du coronavirus qui étaient arrivés chez l’homme ».
Pour réaliser l’étude, les scientifiques se sont penchés sur les espèces de chauves-souris présentes sur le continent africain. Ils ont étudié les données récoltées à partir d’articles de recherches menées entre 1978 et 2020 « pour évaluer les preuves que les chauves-souris africaines sont des hôtes réservoirs et/ou de ponts pour les virus qui causent des maladies humaines » peut-on lire dans le résumé. Un travail de revue systématique effectué, sur plus de 80 000 individus issus de plus de 167 espèces, à travers les données des articles étudiés. Ces dernières concernent les échantillons prélevés, la manière dont ont été sélectionné les espèces, le type de donnée et les virus potentiellement détectés.
Le bilan de l’étude suggère que les chauves-souris ne sont pas fortement impliquées dans la transmission de virus à l’homme: « après un examen et une analyse méticuleuse, nous n’avons trouvé aucune preuve convaincante pour étayer l’idée dominante selon laquelle les chauves-souris abritent un grand nombre de virus qui sont transmis à l’homme. Au contraire, nos résultats ne révèlent que deux systèmes chauve-souris-virus dans lesquels la transmission est clairement documentée » synthétise Natalie Weber, à la direction de l’équipe.
Concrètement, aucune preuve tangible ne semble confirmer l’idée reçue. Seule la roussette d’Égypte semble jouer le rôle d’hôte intermédiaire pour des virus comme ceux de Marburg ou de Sosuga. Les résultats mettent en avant la nécessité pour les scientifiques de raisonner avec une « approche plus nuancée et mieux informée du discours public » complète DeeAnn Reeder, coauteur. Les assignations d’espèces obsolètes étaient courantes dans les études menées durant plusieurs années.
Les chercheurs espèrent que cette découverte va permettre une meilleure compréhension de la chauve-souris et favoriser un meilleur discernement concernant la transmission de virus par des espèces animales. Un exemple récent a fait du pangolin le responsable de la pandémie du Covid-19.
Adrien Ribera
Source supplémentaire : https://www.umontpellier.fr/articles/les-chauves-souris-victimes-de-calomnie